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Élections américaines de mi-mandat : la Chambre des représentants va-t-elle basculer ?
Matt Miller
Économiste politique

L’actualité américaine est depuis quelques semaines dominée par les élections de mi-mandat (ou « midterms ») prévues le 8 novembre 2022. Si l’on en croit certains spécialistes, contrairement aux hypothèses avancées il y a quelques mois, les républicains pourraient rester minoritaires à la Chambre des représentants.


Or à mon avis, une « vague rouge » (la couleur du parti républicain) demeure possible. J’en suis convaincu depuis le début du mandat du Président américain Joe Biden – c’est-à-dire avant même que l’inflation n’atteigne un plus haut depuis 40 ans et que le risque de récession n’apparaisse. Pour ce qui est du Sénat, l’écart se resserre dans de nombreux États-clés, de sorte que l’issue du scrutin pourra se décider aussi bien dans un sens que dans l’autre.


Les démocrates sont-ils sur le point de perdre leur faible majorité à la Chambre des représentants ?

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Sources : Capital Group, 270toWin, Cook Political Report, Office of Clerk of the U.S. House of Representatives. Nombre de districts disputés : nombre total de districts définis par 270toWin comme étant "« likely »," "« leans »," "« tilt »," or "« toss-up »," sur la base des estimations actuelles de huit instituts de sondage (Cook Political Report, FiveThirtyEight, Inside Elections, Fox News, Politico, Split Ticket, Elections Daily et Sabato’s Crystal Ball). Au 14 octobre 2022.

Je tiens à souligner que cette prévision est le fruit d’une analyse, et non d’une prise de position. Mon métier est de conseiller les équipes d’investissement de Capital Group sur les problématiques politiques, et je m’attache à le faire de la manière la plus objective et impartiale possible.


Si mes prévisions s’avèrent exactes, une victoire des républicains privera Joe Biden du soutien démocrate au Congrès pour la deuxième partie de son mandat. Pour les investisseurs, un basculement de la Chambre des représentants fera toute la différence. En effet, si les républicains en venaient à tenir les cordons de la bourse, il deviendrait impossible pour les démocrates de faire adopter d’ambitieuses lois relatives à la fiscalité, au changement climatique ou encore au travail, et ce jusqu’à 2025 au plus tôt.


Il est vrai que les démocrates ont à leur actif quelques victoires législatives récentes. La révocation du droit fédéral à l’avortement et les déboires judiciaires de l’ancien président Donald Trump leur ont également insufflé un certain élan politique, ouvrant la voie à la possibilité d’une « remontada » dans l’échiquier politique américain, avec la perspective – avancée par certains médias – que le parti démocrate parvienne à conserver la majorité au Congrès.


Cette théorie ne me convainc pas, pour plusieurs raisons.


1. Quelques sièges suffiront aux républicains pour emporter la Chambre


Cette année, la majorité républicaine à la Chambre basse du Congrès se jouera à cinq sièges seulement, sachant que lors des précédentes premières élections de mi-mandat, le parti d’opposition en a souvent remporté bien plus.


2. L’impopularité de Joe Biden est un point faible


Après avoir touché un point bas de 38 %, la cote de popularité du président est repassée juste au-dessus de 40 %. Or, il faudrait qu’elle se rapproche de 50 % pour favoriser le camp démocrate, une perspective peu probable à seulement quelques jours des élections. À titre de comparaison, Ronald Reagan, Bill Clinton, Barack Obama ou encore Donald Trump, dont la popularité ne dépassait pas 45 % deux ans après leur arrivée au pouvoir, ont perdu respectivement 26, 52, 63 et 40 sièges à la Chambre des représentants à l’issue de leurs premières élections de mi-mandat.


Lors des élections de mi-mandat, le parti au pouvoir perd généralement des sièges à la Chambre des représentants

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Source : « Seats in Congress Gained/Lost by the President’s Party in Mid-Term Elections », The American Presidency Project.

3. Le resserrement de l’écart entre les partis dans les sondages est trompeur


De nombreux observateurs ont très justement remarqué que l’écart entre les partis mis en évidence dans le « generic ballot » s’était resserré. Le « generic ballot » est un sondage dans lequel les électeurs interrogés doivent indiquer, à un instant T, non pas pour quel candidat ils voteraient, mais plutôt pour quel parti. D’après cette enquête, donc, alors qu’ils accusaient un retard de 2,5 % début mai, les démocrates possèdent désormais une petite avance (données à la date de publication de la version anglaise de cette analyse).


Leur progression est donc manifeste, mais souvenons-nous : la « vague bleue » pourtant largement attendue lors des élections de 2020 (les démocrates distançaient alors les républicains de 7,3 % dans le « generic ballot ») n’a pas eu lieu, puisque les républicains ont pris 14 sièges aux démocrates à la Chambre des représentants. D’ailleurs, en 2014 et en 2016 déjà, le potentiel du parti républicain avait été sous-estimé dans les sondages.


4. Certains experts se sont trompés par le passé


Le site d’analyse politique « Cook Political Report », considéré comme le prévisionniste électoral de référence à Washington, a créé la surprise en septembre dernier en faisant gagner 5 places au parti démocrate et en déclarant qu’une victoire des républicains à la Chambre des représentants « n’était plus assurée ».


Les commentateurs qui se sont emparés de cette annonce semblent avoir oublié à quel point le Cook Political Report avait fait fausse route en 2020, en pronostiquant 10 à 15 sièges supplémentaires pour les démocrates – pour finalement voir les républicains en remporter 14. Voilà qui démontre que si les travaux des experts politiques de Washington apportent un éclairage utile à l’appréciation de la course électorale, on ne peut les prendre pour argent comptant.


D’après les données passées, les actions américaines enregistrent une belle progression lorsque le Congrès est divisé

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Sources : Capital Group, Strategas. Au 31 décembre 2021. Gouvernement unifié : un même parti politique contrôle la Maison-Blanche, la Chambre des représentants et le Sénat. Congrès unifié : la Chambre des représentants et le Sénat sont contrôlés par le même parti, qui n’est pas celui qui occupe la Maison-Blanche .

Selon moi, les médias américains ne font qu’exploiter la thèse de la « remontada » des démocrates pour stimuler leurs audiences. Le camp démocrate mène par ailleurs une offensive pour faire de ces élections de mi-mandat un « choix politique » plutôt qu’un référendum sur l’action du président en exercice. Cependant, les analystes politiques les plus aguerris – y compris ceux de gauche – reconnaissent que les perspectives de victoire à la chambre basse restent clairement en faveur des républicains.


Et si le Congrès revient aux mains des républicains ?


Les relations entre le Congrès et la Maison-Blanche pourraient devenir très tendues. Il faut par exemple s’attendre à une épreuve de force sur le sujet d’un allègement de la fiscalité au profit des classes moyennes : il semblerait en effet malvenu pour le président Biden et les démocrates de s’opposer à une baisse des impôts des contribuables américains alors que les prochaines élections présidentielles pointent à l’horizon.


Voilà le genre de lignes de bataille qui se dessinent pour le scrutin de 2024.



Matt Miller est économiste politique chez Capital Group et présentateur du podcast Capital Ideas. Il était auparavant conseiller principal chez McKinsey, chroniqueur et auteur du Washington Post, hôte du programme « gauche, droite et centre » de la radio publique et assistant à la Maison Blanche pendant l’ère Clinton. Il est titulaire d'un diplôme en droit de Columbia et d’une licence en économie de Brown.


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