L’idée que l’Europe a résolu ses problèmes d’inflation et que de fortes baisses des taux directeurs sont imminentes semble faire consensus. Mais est-ce bien réaliste ? Après tout, les économistes et les marchés avaient largement sous-estimé la récente envolée des prix et le resserrement de la politique monétaire.
23 janvier 2024
D'après Robert Lind, économiste spécialiste du marché européen chez Capital Group, ces prévisions reposent sur deux éléments problématiques.
Le premier, c’est qu’il est très difficile de se fier au modèle d’inflation dont nous disposons. À la suite de la crise sanitaire, de la guerre en Ukraine, et des réponses stratégiques apportées à ces séismes mondiaux, des facteurs liés à l’offre et à la demande se sont combinés de manière complexe et ont entraîné le récent épisode inflationniste. Quand bien même l’inflation globale comme sous-jacente a commencé à faiblir, nul ne peut dire si elle se stabilisera lorsqu’elle atteindra les valeurs cibles.
Le second, c’est que nous ignorons comment l’actualité relative à l’activité économique et à l’inflation influencera les politiques monétaires. Après les chocs observés ces dernières années, il est devenu plus difficile de comprendre les choix opérés par la BCE et la BoE.
D’un côté, les plus optimistes, aussi appelés les « colombes », se souviendront de la période qui a suivi la crise financière mondiale, marquée par une inflation en berne et par les effets de la faible demande sous-jacente et de stratégies d’austérité excessives que la politique monétaire a peiné à compenser. De l’autre, les plus pessimistes, qu’on appelle les « faucons », auront à l’esprit la crise des années 1970, durant laquelle les banques centrales avaient accepté d’assouplir leur politique monétaire d’après-guerre, entraînant des chocs d’offre et de demande qui avaient provoqué une très forte hausse de l’inflation.
Que l’on soit optimiste ou pessimiste, la prudence commande d’attendre : l’inflation va-t-elle s’inscrire dans les niveaux cibles de manière durable ?

Robert Lind est économiste chez Capital Group. Il possède 36 ans d’expérience dans le secteur de l’investissement et a rejoint Capital Group il y a 7 ans, après avoir été responsable de la recherche macro chez ABN AMRO, puis économiste en chef chez Anglo American. Il est titulaire d’une licence de philosophie, politique et économie de l’université d’Oxford. Robert est basé à Londres.