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Capital IdeasTM

Perspectives d’investissement de Capital Group

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Marchés et économie
La nouvelle réalité des marchés : 5 tendances d’avenir
Jody Jonsson
Gérante de portefeuille d’actions

Partout dans le monde, une nouvelle réalité est en train de s’installer sur les marchés financiers.


L’accent mis ces derniers mois sur la rotation des titres « growth » au profit des titres « value » me paraît un peu trop simpliste. D’après mon analyse, plusieurs changements sont en train de se produire simultanément et pourraient redessiner la structure des marchés mondiaux pour les dix prochaines années.


La plupart des investisseurs s’attendent en effet à un retour à la normale une fois que l’inflation sera retombée et que les taux d’intérêt cesseront de monter. Je pense pour ma part que le monde est en train de vivre d’importantes transformations et que les investisseurs devront revoir leurs anticipations sur ce qu’ils considèrent comme un environnement d’investissement « normal ». J’ai ainsi identifié cinq grandes mutations à l’œuvre dans les économies et sur les marchés, ainsi que leurs conséquences possibles en matière d’investissement sur le long terme.


1.  La fin des taux bas : le loyer de l’argent restera élevé et l’inflation sera forte


Le marché est actuellement aux prises avec un contexte macroéconomique qu’il n’avait pas connu depuis très longtemps. L’inflation est à son plus haut depuis le début des années 1980, et récemment encore, les taux d’intérêt étaient dans une phase baissière qui avait débuté il y a 40 ans – soit avant que la plupart des gérants d’actifs en activité ne débutent leur carrière, voire que certains d’entre nous ne naissent ! Voilà en partie pourquoi le marché peine à s’ajuster à cette nouvelle réalité.


Est-ce la fin de 40 ans de désinflation ?

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Sources : Capital Group, Refinitiv Datastream. Au 26 octobre 2022.

Il est facile de supposer que ces perturbations se résorberont rapidement – les marchés obligataires anticipent par exemple un retour de l’inflation à 2 % dans les deux prochaines années. En réalité, ces cycles durent souvent bien plus longtemps que la plupart des observateurs ne l’imaginent, et il y a des raisons de penser que l’inflation sera de nature structurelle et qu’elle pourrait donc persister dans le temps.


Dans ce nouvel environnement, je me méfie des entreprises lourdement endettées, mais aussi de celles qui lèvent de nouveaux financements. L’argent n’étant désormais plus « gratuit », elles seront contraintes de puiser davantage dans leurs bénéfices pour assurer le service de leur dette. En revanche, les entreprises capables de se financer de façon autonome, en mesure d’imposer leurs prix ou encore assorties de cash-flows solides auront le vent en poupe.


2.  Hiérarchie des marchés actions : élargissement en vue


Je pense que le marché sera beaucoup moins concentré à l’avenir. La configuration de ces dix dernières années, dans laquelle dominait une poignée de valeurs technologiques qu’il fallait absolument détenir pour rester dans la course, n’a plus lieu d’être.


Je m’attends à ce que les opportunités proviennent d’une multitude de sociétés, de secteurs et de régions. C’est l’occasion pour les sociétés non technologiques bien gérées de se démarquer à nouveau.


Par exemple, les e-commerçants – très innovants à leurs débuts – voient aujourd’hui leur prééminence remise en cause, en raison de marges très faibles, de coûts de développement élevés et d’une logistique de livraison complexe. Rares, en effet, sont les sociétés de ce secteur qui ont préparé correctement leur avenir. À l’inverse, certains distributeurs traditionnels qui ont combiné les atouts de leurs magasins physiques avec une offre en ligne attrayante commencent à reprendre des parts de marché aux plateformes 100 % Internet.


Les valeurs vedettes deviennent moins concentrées

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Sources : Capital Group, Refinitiv Datastream, Standard & Poor’s. Au 30 septembre 2022. Indexation à 100 au 1er janvier 2005.

Après le plongeon boursier de 2020, je tablais sur un bouleversement de la hiérarchie des marchés, un pronostic qui s’est confirmé. Il s’agit là d’une évolution positive, qui corrobore ma démarche de déconcentration de mes propres portefeuilles. En théorie, cela devrait compliquer la tâche des investisseurs appliquant une gestion indicielle, et donc profiter aux adeptes de l’approche fondamentale, c’est-à-dire aux « stock pickers ».


3.  Actifs : du numérique au physique


Le dernier marché haussier a été dominé par des opérateurs de sites de vente en ligne, de plateformes de streaming, de moteurs de recherche et autres réseaux sociaux – autrement dit, des sociétés technologiques qui ont bâti leur réussite exclusivement sur le numérique. Leur bonne fortune a cependant masqué le fait qu’une nouvelle économie ne peut exister sans l’appui de secteurs plus conventionnels. Non pas que les sociétés 100 % digitales soient vouées à disparaître, mais je pense que les investisseurs vont commencer à accorder plus d’importance aux acteurs des matières premières et aux producteurs d’actifs physiques.


Un super cycle de dépenses d’équipement pourrait favoriser la renaissance de l’industrie

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Sources : Capital Group, FactSet, MSCI. En USD courants. Au 31 décembre 2021.

Certains investisseurs pourraient par ailleurs considérer que certaines tendances, telles que la transition vers les énergies renouvelables, contribueront à éradiquer les opérateurs historiques dans les secteurs traditionnels comme l’industrie, les matériaux ou encore l’énergie. Je pense au contraire que l’on pourrait trouver des gagnants parmi les acteurs qui aident les entreprises à améliorer leurs performances énergétiques – que ce soit dans le domaine des bâtiments intelligents, de l’efficacité énergétique ou des systèmes bas carbone de chauffage, ventilation et climatisation. D’autres tendances globales comme la modernisation du réseau électrique, le rapatriement de la production ou encore la sécurité énergétique pourraient également faire converger les investissements dans les secteurs concernés. Dans ces segments, les sociétés industrielles bien dirigées pourraient connaître une véritable renaissance.


4.  De l'appréciation des « multiples » à la croissance des résultats


Quantité d’investisseurs moins expérimentés se sont habitués aux cours stratosphériques des actions ces cinq à dix dernières années, et partent maintenant du principe qu’elles y reviendront dès le prochain marché haussier. Or, la période caractérisée par des multiples très élevés et des taux quasi nuls est à mon sens révolue.


Quand j’évalue mon portefeuille, j’essaie de répondre à la question suivante : et si les actions ne renouent pas avec des PER de 25 fois leurs bénéfices attendus en 2027, et qu’elles ne s’échangent qu’à 15 fois ? Si je parviens m’exposer à un tel niveau de PER, alors je pourrai probablement limiter le risque baissier. C’est pourquoi je recherche des entreprises faiblement valorisées dans les segments « émergents » et « croissance ». J’apprécie également les sociétés dont la valorisation est assortie d’un potentiel haussier, mais sans impact sur leur thèse d’investissement.


Si l’appréciation des multiples s’avère effectivement limitée au cours du prochain marché haussier, alors la croissance des résultats devra prendre le relais pour soutenir les actions. Dans un tel scénario, les investisseurs pourraient manquer de patience à l’égard des sociétés déficitaires. Voilà qui pourrait jouer contre les entreprises appliquant un modèle économique basé sur de faibles taux d’intérêt, mais aussi contre celles qui – contrairement à la logique économique – ont jusqu’à présent financé leurs pertes tout en tentant de grandir rapidement. Et maintenant que le loyer de l’argent est en train d’augmenter, les investisseurs qui acceptaient autrefois de payer cher dans l’espoir de bénéficier d’une croissance future (financée par la dette) se montrent aujourd’hui plus réticents à s’exposer à ce genre de profil.


5.  Chaînes d’approvisionnement : du mondial au régional


En marche depuis plusieurs décennies, la mondialisation des chaînes d’approvisionnement semble s’inverser. Pendant une génération, les entreprises ont délocalisé leurs usines à l’étranger pour réduire leurs coûts et stimuler leurs marges. Mais la tendance à privilégier l’efficacité au détriment de la résilience a désormais montré ses limites. La montée des tensions géopolitiques et les perturbations liées à la crise du Covid incitent aujourd’hui les entreprises à rapprocher leur appareil productif de leurs marchés finaux.


Bien que les difficultés d’approvisionnement liées aux confinements sanitaires se soient en partie résorbées, quantité d’entreprises en subissent encore le contrecoup. La situation dans laquelle l’industrie automobile se trouve est caractéristique : plusieurs dizaines de milliers de voitures inachevées attendent encore leurs derniers composants – pour la plupart insignifiants et peu chers, tels que des semiconducteurs. Conséquence, les entreprises créent désormais des redondances dans leurs chaînes d’approvisionnement, de manière à ce qu’aucune pénurie ne fasse dérailler l’ensemble de leur activité.


Ce changement restera dans l’air du temps, car même si les perturbations liées à la crise sanitaire finissent par disparaître, les conflits géopolitiques pourraient à mon avis durer. L’environnement actuel me rappelle celui des années 1970, avec la guerre froide, la multiplication des confrontations avec la Chine, la montée des régimes autoritaires et le recul de la coopération mondiale. Depuis la chute du mur de Berlin, nous avons vécu plus de 30 années globalement paisibles et prospères. Aujourd’hui, les risques remontent, un contexte dans lequel on peut s’attendre à une baisse des valorisations et à une volonté des entreprises de se réorganiser pour mieux résister.


La montée des tensions mondiales multiplie les risques liés à la dépendance aux chaînes d’approvisionnement internationales

Sources : Capital Group ; Caldara, Dario et Iacoviello, Matteo (2022), « Measuring Geopolitical Risk », American Economic Review, avril 2022, 112(4), pp. 1194-1225. L’indice du risque géopolitique (données mensuelles moyennes lissées sur 12 mois) mesure les événements géopolitiques défavorables et les risques qui en découlent, à partir de tous les articles publiés sur cette thématique dans 10 journaux depuis 1985. Au 30 septembre 2022.

Prenez Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC), numéro un mondial des semiconducteurs de pointe : après avoir concentré la majorité de ses capacités de production à Taïwan – aujourd’hui point névralgique de tensions géopolitiques – la société est en train de construire sa première méga-usine aux États-Unis et une nouvelle usine au Japon. Cette régionalisation de l’activité devrait déboucher sur une chaîne d’approvisionnement plus efficace pour ses principaux clients américains, dont des constructeurs automobiles et géants technologiques comme Apple, Qualcomm ou encore Broadcom.


Une approche d’investissement flexible pour faire face au mauvais temps


Entre faibles taux d’intérêt et marchés haussiers, les dix dernières années ont ressemblé à une longue journée ensoleillée à la plage. Si les estivants se sont précipités à l’abri pour échapper aux quelques averses récentes, ils restent prêts à retourner sur le sable une fois que l’orage sera passé. Mais ils ne réalisent pas que le système météorologique a changé, avec plus de nuages, des températures en baisse et des vents plus violents. Dans de telles conditions, le farniente n’est plus à l’ordre du jour.


Bien que cette perspective puisse paraître déprimante, je la trouve au contraire stimulante pour les investisseurs. Après tout, les nouveaux contextes de marché sont source de nouvelles opportunités, et c’est là que l’expérience et l’agilité peuvent faire toute la différence.



Jody Jonsson a 31 ans d'expérience dans le domaine de l'investissement, dont 29 au sein de Capital Group. Elle a couvert des industries telles que l'assurance et les produits de consommation courante. Elle est titulaire d'un MBA de Stanford, et d’une licence de Princeton. Jody est détentrice de la certification CFA ® et est membre du CFA Institute.


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