Ce que les élections américaines signifient pour les investisseurs
5 novembre 2020
Avec: John Emerson , Matt Miller & Darrell Spence
Points clés
- Les investisseurs doivent se préparer à une volatilité de marché accrue après le jour des élections.
- Les républicains vont probablement conserver le Sénat, ce qui se traduira par un Congrès divisé — un résultat qui a toujours donné lieu à des rendements de marché plus élevés.
- Malgré l’incertitude, les investisseurs doivent se rappeler que les bénéfices des sociétés, et non les élections, sont le moteur du marché boursier.
L’incertitude de 2020 se poursuit.
Après avoir enregistré des chiffres record de participation le jour de l’élection, les électeurs américains se sont réveillés mercredi matin sans véritable vainqueur. Dans une course qui s’est révélée beaucoup plus serrée que ce que de nombreux sondages avaient prévu, le résultat de l’élection ne sera probablement pas connu avant plusieurs jours, voire plusieurs semaines.
« Il faudra faire preuve de patience pour traverser cette période d’incertitude politique », déclare John Emerson, Vice-président de Capital Group International et ancien ambassadeur américain en Allemagne. « Il reste encore des millions de votes à dépouiller, y compris un grand nombre de votes par correspondance, donc un retard n’est pas si surprenant. Cela fait des mois que nous mettons en garde contre ce scénario. »
D’un point de vue de l’investissement, M. Emerson explique qu’il est probable que la volatilité du marché se maintienne à des niveaux élevés jusqu’à ce que le président Donald Trump ou l’ancien vice-président Joe Biden soit déclaré vainqueur. Le marché boursier américain a connu une forte reprise le jour de l’élection, l’indice S&P 500 enregistrant une hausse de 1,8 %. Mercredi, cependant, les actions ont continué de grimper dans un contexte d’incertitude, les résultats de plusieurs États clés restant trop serrés pour déclarer un vainqueur. Les bons du Trésor se sont redressés, en partie grâce à l’hypothèse selon laquelle un gouvernement divisé pourrait réduire les perspectives de relance budgétaire excessive.
« Il y a actuellement beaucoup d’anxiété, et à juste titre », ajoute M. Emerson, « Mais les investisseurs devraient très sérieusement envisager de s’en tenir à leurs objectifs d’investissement à long terme, plutôt que de réagir aux événements politiques à court terme. C’est souvent une erreur. »
Au cours de l’histoire, les marchés ont réussi à traverser des élections présidentielles contestées, des pandémies et des récessions économiques, généralement pas toutes au cours de la même année, mais ils ont néanmoins réussi. Qu’un démocrate ou un républicain occupe la Maison Blanche n’a guère changé le rendement global des investissements à long terme.
Et maintenant, que faut-il faire ?
Le décor a été planté pour des batailles de dépouillement des votes, et de multiples poursuites judiciaires, dans les États pivots pour lesquels le vainqueur n’a pas encore été déclaré. Mercredi matin, selon The Associated Press, ces États comprenaient la Pennsylvanie, le Nevada, la Caroline du Nord et la Géorgie.
« Les résultats préliminaires du scrutin pour chaque État seront probablement connus au plus tôt jeudi ou vendredi, en fonction des contentieux qui s’annoncent », déclare Matt Miller, économiste politique et analyste politique chez Capital Group. « La présidence pourrait basculer d’un côté comme de l’autre durant la période difficile qui nous attend. »
En ce qui concerne le dépouillement de la nuit électorale, le pays reste pour l’essentiel aussi divisé qu’il y a quatre ans, lorsque Donald Trump a remporté, contre toute attente, l’élection de 2016. « À minuit le jour de l’élection, Joe Biden avait 64,6 millions de voix et Donald Trump, 63,2 millions — sur un total prévu de 160 millions de votes, ce qui établirait un record », note M. Miller. « Celui qui remporte cette élection aura la lourde tâche d’essayer d’unir et d’apaiser une nation qui est divisée en deux. »
Pour les autres postes à briguer, il semble que les républicains conserveront la majorité au Sénat, déclare M. Miller, tandis que les démocrates garderont le contrôle de la Chambre des représentants, ce qui se traduira par un Congrès divisé. C’est le cas depuis les élections de mi-mandat de 2018, lorsque les républicains ont perdu la Chambre des représentants. Incidemment, d’après notre analyse, les marchés se sont mieux comportés avec un Congrès divisé.
Les deux principales problématiques de l’élection
Selon la plupart des sondages, l’économie américaine et l’épidémie de coronavirus ont été les deux principales problématiques de l’élection présidentielle. La manière dont Donald Trump a géré la pandémie lui a été largement défavorable, tandis que les électeurs ont été davantage satisfaits par ses politiques économiques. Les États-Unis sont entrés en récession en début d’année, les confinements imposés par le gouvernement ayant entraîné l’arrêt presque total de l’activité économique.
Toutefois, dans la mesure la plus récente pour l’activité économique américaine, publiée seulement cinq jours avant l’élection, la croissance du PIB américain, bénéficiant de la demande croissante des consommateurs et des mesures de relance massives du gouvernement, a fortement rebondi pour atteindre un taux annuel de 33,1 %. Les ventes de logements aux États-Unis, qui ont bénéficié de la hausse de la demande et de taux hypothécaires historiquement bas, ont été un facteur clé.
Malgré une volatilité extrême au cours de l’exercice, le marché boursier américain a également connu une tendance à la hausse. Depuis le début de l’année jusqu’au 30 octobre, l’indice S&P 500 a gagné 2,8 %, les actions technologiques et technologie grand public se redressant en raison des confinements.
« La performance à court terme de l’économie et des marchés pourrait avoir joué un rôle dans cette élection, mais en réalité, les présidents sont bien trop acclamés lorsque les choses vont bien et bien trop critiqués lorsque les choses vont mal », explique Darrell Spence, économiste chez Capital Group. « Dans la plupart des cas, les dynamiques qui contribuent à la croissance économique et aux rendements du marché sont mises en place bien avant l’élection et restent présentes bien longtemps après. »
« En tant qu’investisseurs, nous essayons de nous concentrer sur les fondamentaux sous-jacents qui stimulent l’économie et la rentabilité des entreprises », note M. Spence. « Cela a souvent très peu de rapport avec le candidat qui remporte une élection. »
John Emerson
Vice-président du conseil d'administration de Capital Group International, Inc.
John est vice-président de Capital Group International, Inc. John a 19 ans d'expérience dans l'industrie (au 31/12/19), tous au sein de Capital Group. Il a été ambassadeur des États-Unis en Allemagne de 2013 à 2017. Avant cela, il était président de Capital Group Private Client Services.
Matt Miller
Économiste politique
Matt est économiste politique chez Capital Group et présentateur du podcast Capital Ideas. Il était auparavant conseiller principal chez McKinsey, chroniqueur et auteur du Washington Post, hôte du programme « gauche, droite et centre » de la radio publique et assistant à la Maison Blanche à l’ère Clinton. Il est titulaire d'un diplôme en droit de Columbia et d’une licence en économie de Brown.
Darrell Spence
Économiste
Darrell est un économiste et un directeur de recherche ayant 27 ans d'expérience dans le domaine de l'investissement, tous au sein de Capital. Il a obtenu une licence en économie à l'Occidental College et est titulaire de la charte CFA.