Investissement à long terme
PRINCIPAUX POINTS À RETENIR
L’augmentation des craintes liées à la propagation du coronavirus ont donné lieu à une forte baisse des marchés boursiers, alors que les investisseurs tentent de comprendre l’incidence de la pandémie sur l’économie mondiale. Le lundi 9 mars, en réaction à l’annonce de la propagation du virus et du récent choc pétrolier, l’indice Standard & Poor’s 500 Composite Index a chuté de 7,6 %, déclenchant un arrêt de 15 minutes des opérations boursières. Dans cette entrevue, Tim Armour, président-directeur général de Capital Group, présente son point de vue sur les événements récents et fait le point sur les mesures prises par Capital Group à l’égard des portefeuilles pour les aider à se prémunir contre la volatilité des marchés.
Jusqu’en janvier 2020, la plupart d’entre nous n’avaient jamais entendu parler de ce virus. En très peu de temps, nous sommes devenus de plus en plus préoccupés par la perspective d’une pandémie mondiale et ses répercussions sur l’économie mondiale. On comprend aisément que les gens ont peur; il s’agit d’une nouvelle maladie et on ne sait toujours pas à quoi ressemblera son évolution. D’abord et avant tout, le virus a un coût humain réel. On ignore combien de personnes tomberont malades ou, pire encore, mourront. Bien entendu, nos pensées vont en premier lieu aux personnes qui ont contracté la maladie et à leurs familles.
Oui, il s’agit d’une nouvelle maladie, mais de nombreuses pandémies et d’autres sortes de crises sont survenues dans le passé, et les marchés y ont toujours survécu. Aujourd’hui, une certaine panique s’est installée un peu partout sur la planète, et je m’attends à ce qu’au cours des prochaines semaines, l’augmentation du nombre de cas inquiète beaucoup de gens. Notre équipe a étudié l’histoire des pandémies et les tendances de leur évolution. Généralement, elles ont connu des pics et des flambées, et elles ont duré un certain temps, mais elles ont fini par disparaître. Tôt ou tard, la propagation du virus sera endiguée et la vie reprendra son cours normal, tout comme les marchés.
Nous observons déjà des signes de ralentissement aux États-Unis, non seulement du côté de l’offre, alors que les entreprises se préparent pour la suite des choses, mais aussi du côté de la demande. Nous savons tous que des conférences et des spectacles d’envergure ont été annulés, que des entreprises ont reporté leurs grandes assemblées et que les consommateurs remettent leurs voyages à plus tard et cherchent à diminuer le contact social.
Les entreprises des domaines du voyage, du loisir et du divertissement seront probablement les plus touchées, sans oublier le secteur pétrolier et les autres produits de base, où la demande mondiale est déjà en forte contraction. Une récession aux États-Unis est de plus en plus probable. Les bénéfices des entreprises pourraient devenir négatifs au premier trimestre, ce qui continuerait de miner la confiance des investisseurs.
En revanche, l’économie américaine demeure l’une des plus résilientes au monde. Elle a toujours su se sortir des marasmes économiques. Les taux d’intérêt sont faibles, et la baisse des prix du pétrole devrait soutenir davantage les consommateurs. De plus, en Chine, la propagation du virus semble avoir atteint son pic. Par conséquent, je crois que le pic de la propagation mondiale sera atteint plus tôt que prévu.
Nous observons une chute des marchés telle que nous n’avons pas vécue depuis la crise financière mondiale. Le 9 mars marque le 11e anniversaire du creux atteint par les marchés lors de la crise financière mondiale, et ceux-ci ont souligné cet anniversaire en enregistrant le plus important repli quotidien jamais observé.
À la clôture des marchés lundi (le 2 mars), le marché des actions dans son ensemble, mesuré par l’indice S&P 500, avait reculé de près de 19 % par rapport à son sommet atteint plus tôt cette année, et bientôt nous pourrions nous retrouver en territoire baissier, qui se caractérise par un recul de plus de 20 %. Ce serait le premier marché baissier en plus d’une décennie de rendements généralement solides. Dans l’ensemble, et selon la plupart des indicateurs, les actions semblaient avoir atteint leur pleine valeur au début de la présente période, et les marchés pourraient demeurer volatils pendant un certain temps. En plus de l’incertitude que suscite la propagation du virus, les États-Unis sont en pleine année électorale.
Du côté du marché obligataire, nous assistons à une ruée vers les valeurs refuges, ce qui a poussé les taux obligataires à des creux sans précédent. Le taux des obligations du Trésor américain à 10 ans a chuté à 0,5 %. Les taux d’intérêt pourraient encore baisser, alors que la Réserve fédérale américaine cherche à injecter des liquidités sur les marchés au moyen de réductions des taux d’intérêt et en adoptant des mesures d’assouplissement quantitatif. À la longue, les faibles taux d’intérêt finissent par soutenir les actions.
Bien que le rythme et l’ampleur de la récente volatilité puissent être déconcertants, ils ne sont pas tout à fait surprenants. La confiance des investisseurs est fragile et le restera probablement jusqu’à ce que la propagation du virus ralentisse. Dans un tel contexte, les investisseurs résilients qui réussiront à faire preuve de patience seront récompensés à long terme.
Je suis plutôt rassuré de voir que la Réserve fédérale souhaite prendre des mesures vigoureuses; elle a réduit les taux d’intérêt de 50 points de base lors d’une séance d’urgence le 3 mars, ce qui a abaissé sa fourchette cible entre 1,00 % et 1,25 %. La Fed a déclaré qu’elle suit de près l’évolution de la situation et les répercussions sur les perspectives économiques, qu’elle utilisera ses outils et qu’elle agira comme il se doit pour soutenir l’économie. Dans l’ensemble, les marchés s’attendent à ce que la Fed procède à une nouvelle réduction de taux à sa prochaine réunion, prévue pour les 17 et 18 mars.
Au cours de mes 37 années en tant qu’investisseur professionnel chez Capital Group, j’ai vécu de nombreux épisodes d’instabilité des marchés, y compris la crise des caisses d’épargne américaines à la fin des années 1980, la bulle technologique et des télécommunications qui a connu sa fin en mars 2000, et la crise financière mondiale de 2008 et de 2009. Chacune de ces crises a été unique, et leurs conditions sous-jacentes étaient très différentes. Mais chaque fois, les marchés ont rebondi. Je suis d’avis que les marchés et les entreprises de grande qualité survivront au repli des marchés actuel et rebondiront.
Permettez-moi de vous faire part des propos de deux de mes prédécesseurs qui m’ont encadré pendant des périodes comme celle-ci. Au cœur de l’un des pires marchés baissiers de l’histoire, Jim Fullerton, président du conseil de Capital Group en 1974, a écrit ces mots qui sont éloquents encore aujourd’hui :
« Une des principales raisons qui explique une telle faiblesse des marchés, l’extrême pessimisme, la confusion déconcertante et la terreur qui règnent dans l’esprit des courtiers et des investisseurs à l’heure actuelle, c’est que la plupart des gens aujourd’hui n’ont jamais vécu une pareille situation de leur vivant, rien qui ne ressemble à la présente chute des marchés. Mon message est donc : courage! Nous avons déjà traversé de telles situations. Les marchés baissiers ont déjà duré aussi longtemps. Les fonds communs de placement bien gérés ont déjà connu une telle baisse. Et les porteurs de titres de ces fonds, de même que notre secteur, ont survécu et prospéré. »
Jim Rothenberg, ancien président du conseil de Capital Group, a déclaré ce qui suit en pleine crise financière mondiale en 2008 :
« J’ai été témoin de nombreuses turbulences sur les marchés et je sais à quel point il est difficile de ne pas se laisser emporter par l’instant présent. C’est particulièrement vrai lorsque les médias nous inondent chaque heure de nouvelles, de spéculations et de rumeurs. Cependant, je sais aussi qu’en tant qu’investisseurs à long terme, nous devons nous concentrer sur la réalité qui est ensevelie sous le bruit et le flux étourdissant de données. »
Pour l’instant, je ne crois pas qu’il soit réaliste de s’attendre à une reprise rapide. La situation pourrait très bien s’aggraver avant de s’améliorer. Mais je crois que les marchés finiront par rebondir. La présente crise passera, elle aussi. À ce moment-là, les investisseurs à long terme qui auront réussi à ignorer le bruit de fond quotidien — et les chiffres rouges qui clignotent sur leurs écrans — et à se concentrer sur le long terme devraient ultimement être récompensés.
Je suis d’avis que nous devrons faire face à d’autres flambées comme celle liée à la COVID-19 et que nous finirons par nous y ajuster. À Capital, nous prenons toutes les précautions nécessaires pour nous y préparer. Nous nous attendons à ce que la COVID-19 nous occupe pendant un certain temps encore, peut-être un an ou deux.
Un autre point : Nous avons des bureaux à Singapour, à Beijing, à Hong Kong et à Tokyo où travaillent un grand nombre d’employés. Ils ont traversé quatre semaines de COVID-19 déjà. En Chine, les gens commencent déjà à retourner au travail. Nos associés à ces bureaux ont dû faire face à une situation d’urgence il y a un mois et aujourd’hui, ils retournent à une vie et à un environnement d’affaires plus normaux. Ils estiment que la situation est bien mieux maîtrisée maintenant. À mon avis, la situation finira probablement par évoluer de la même manière aux États-Unis et en Europe.
Notre entreprise a été fondée en 1931, en pleine dépression, dans le but de gérer des mandats de placement conçus pour obtenir de bons résultats en période de volatilité des marchés. Notre but est de protéger le capital de nos investisseurs pendant les baisses et d’investir à long terme. Cela est vrai pour Capital Group à l’échelle mondiale, mais aussi pour nos investisseurs au Canada, où nous offrons des portefeuilles depuis 2002. J’ai récemment examiné les résultats que nos fonds ont dégagés au cours de cette brève période de turbulences. En ce qui concerne nos fonds canadiens, vous constaterez que bon nombre d’entre eux se sont comportés comme prévu : ils ont relativement mieux fait que leurs principaux indices de référence (au 9 mars 2020).
Évidemment, notre première préoccupation est d’assurer la santé et la sécurité de nos employés. Nous souhaitons de même pour les investisseurs et les conseillers. Soyez assurés que, à mesure que la situation évoluera, nos quelque 350 professionnels en placement dans nos bureaux partout dans le monde continueront de faire ce qu’ils ont toujours fait : analyser les entreprises et poser des jugements en temps réel sur leur valeur potentielle à long terme. La recherche fondamentale approfondie et une vision à long terme des marchés sont au centre de notre mission. Nous nous efforcerons d’offrir aux investisseurs une expérience plus fluide et moins volatile que l’ensemble des marchés.
En période de repli des marchés, les émotions se bousculent, c’est tout à fait naturel et compréhensible. Mais c’est exactement dans des périodes comme celle que nous vivons en ce moment qu’une vision à long terme est importante. Selon l’histoire ainsi que ma propre expérience, je suis convaincu que les marchés rebondiront et que la vie reviendra à la normale. Maintenant plus que jamais, les investisseurs devraient être en communication étroite avec leurs conseillers, afin de réaffirmer leurs objectifs à long terme.
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